GIFRER : l’amère potion de Monsieur Karl Verlinden

Publié le 14/12/2020

Pour les élus CFDT, l’annonce brutale de la suppression de 125 postes sur les 215 que totalise le laboratoire Gifrer est tombée comme un couperet lors du CSE du 22 septembre dernier. Entre indignation, la direction ayant proposé en juillet la reconstruction d’un outil industriel neuf, et incompréhension, l’ARS ayant classé le laboratoire comme « entreprise de produits de première nécessité » au printemps !- ce sont des élu.es CFDT et des salarié.es déterminé.es qui ont entamé un bras de fer avec la direction.

Un plan social en décalage avec la période

Alors que La vague des plans sociaux s’installe dans le paysage économique comme une fatalité, l’équipe CFDT de l'entreprise Gifrer n’est pas épargnée et se bat depuis plusieurs mois contre le plan social annoncé dans leur entreprise. Accompagnés par le syndicat CFDT SCERAO et l’URI CFDT AURA, bénéficiant des conseils d’experts juridiques et économiques partenaires, les élus CFDT se sont lancés dans un combat à forts enjeux humains, sociaux et économiques pour préserver l’emploi mais aussi un savoir-faire et des compétences uniques, un combat emblématique aussi en termes de sécurité sanitaire.

Crée en 1912 à Décines-Charpieu, le laboratoire Gifrer-Barbezat est en effet un leader historique de la fabrication d’antiseptiques : la production des flacons d'éther ou les uni-doses de sérum physiologique permettent à l'entreprise de frôler les 50 millions d'euros de chiffre d'affaires, en « hausse moyenne de 3,8 % par an ces cinq dernières années », comme le souligne la direction, pas cynique du tout !

Lors de la première phase de la covid-19, les salariés volontaires ont accumulé les heures supplémentaires, enchaînant des semaines de 48 à 60 heures pour produire des antiseptiques et des précurseurs de gel hydro-alcoolique pour les établissements hospitaliers et les particuliers. Le PSE présenté par la Direction prévoit justement d’arrêter la totalité de la production sur ce site qu’elle juge « obsolète », pour la sous-traiter et en rapatrier une partie en Belgique. Inutile de préciser que la suppression de l’outil de production privera la France d’une capacité de production d’antiseptique en pleine période de pandémie ! « On ne gagne aucune bataille sociale et sanitaire si on ne gagne pas la bataille de la production et de l’industrie » affirmait pourtant en juin dernier le président de la république, qui appelait à relocaliser et à sanctuariser la fabrication de produits pharmaceutiques.

GIFRER 2

Un combat pour sauver 125 emplois

Gifrer c’est aussi un savoir-faire unique et historique dans le domaine de l’extraction végétale, une expertise qui concerne aussi bien les applications pharmaceutiques, neutraceutiques que cosmétiques. L'arrêt de cette production impactera aussi bon nombre d’entreprises. Cette spécialité, pour un marché B to B en pleine croissance, la CFDT l’a positionnée au cœur de son projet d’alternative industrielle, qu’elle a d’ailleurs présenté récemment aux élus locaux. La CFDT a aussi fortement exprimé ses craintes quant à une fermeture complète du site de Décines : « Ils veulent garder la marque et vendre les terrains. » résume ainsi un élu de l'entreprise. Le 8 décembre, la ville de Décines et la Métropole de Lyon ont annoncé le rachat du site foncier à sa valeur de marché « pour permettre le maintien des activités productives et tenter de sauver les 125 emplois qui sont actuellement menacés dans le cadre du Plan de Sauvegarde de l’emploi acté cet été ».  Les élu.es espèrent ainsi relancer les négociations avec le PDG de la société, Karl Verlinden, et se sont engagés par ailleurs a interpeller par courrier Agnès Pannier-Runachier, Ministre déléguée auprès du Ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, chargée de l’Industrie.

Au mépris et à l’arrogance d’un patron qui refusent d’engager de nouvelles négociations, la CFDT et les salarié.es opposent leur détermination, revendiquant « d’être en droit d’obtenir reconnaissance et ce, à la mesure de leur investissement, ni plus, ni moins ! ».

En grève depuis le 8 décembre, les salariés sont prêts à s’engager sur du long terme et ne comptent pas brader leur dignité. Les nombreux encouragements et témoignages de soutien de la population de Decines les ont profondément touché ; le combat sera rude : les salarié.es, avec le soutien des  élu.es  CFDT au CSE ont ouvert une cagnotte solidaire, à laquelle chacun.e peut participer ici.