COVID-19 2ème vague : témoignage de Marie-Christine, agent social dans une résidence autonomie

Publié le 14/12/2020

Alors que nous connaissons une seconde vague et que nombreux.ses sont les français.es re confiné·e·s, Flash Trait d'Union donne à nouveau la parole à ces femmes et ces hommes qui permettent à la vie de continuer.

Trait d'Union : Qui es-tu ?

Marie-Christine : Je m’appelle Marie-Christine, j’ai 62 ans et je travaille depuis de longues années au sein d’une résidence autonomie de 53 logements en qualité d’agent social. Cet établissement, qu’on appelait auparavant foyer logement, est géré par le centre intercommunal d’action sociale du Grand Annecy. Il accueille des personnes de plus de 60 ans, valides et autonomes, seules ou en couple, désireuses de bénéficier d'un logement individuel dans un cadre sécurisé. C’est une solution qui conjugue à la fois indépendance et convivialité dans un cadre de vie permettant de lutter contre l'isolement, l'insécurité, tout en préservant le lien social. En cas de perte d'autonomie, l'orientation en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes est aussi facilitée. L'éventuelle transition vers un EHPAD est généralement plus douce pour la personne car elle est davantage habituée à la vie en collectivité qu'une personne venant directement de son domicile privé, et sur le plan administratif, les démarches sont simplifiées et les résidents peuvent trouver une place plus rapidement.

 

TU : Quel impact la crise sanitaire a-t-elle eu sur ton travail quotidien ?

MC : Habituellement, mon travail consiste à entretenir les parties communes (salle à manger, salon, circulation), à servir les repas du midi et du soir en salle de restaurant, mais aussi à faire des passages réguliers pour l’entretien des appartements au cours de la journée. La crise sanitaire nous a imposé des protocoles d’hygiène très stricts, qui se traduisent concrètement par des heures et des heures de ménage pour assurer une désinfection dans le respect des normes. Frotter, frotter, frotter, c’est notre désormais notre quotidien ! Par ailleurs, nous devons aussi prendre chaque matin la température des résidents, veiller à ce qu’ils disposent de masques propres. Nous déplorons une dizaine de malades parmi les résidents et six d’entre eux sont malheureusement décédés. Les ¾ du personnel ont été atteints par la covid-19, ce qui a aussi perturbé l’organisation du travail. Nous étions trois agents par jour pour effectuer ces missions, aujourd’hui, alors que la charge de travail a augmenté nous ne sommes plus que deux. Face à la pénurie de personnel, la direction a aussi sommé le personnel testé positif et restant asymptomatique de venir travailler. Dans ce cas, les agents étaient affectés auprès des résidents eux aussi malades. Ce fut d’ailleurs mon cas : testée positive, le directeur m’a demandée de venir renforcer l’effectif de l’EPHAD qui jouxte notre établissement. J’étais en poste depuis ¾ heure quand il est venu m’informer que je pouvais retourner chez moi ! Je pense que compte tenu de mon âge, et des préconisations du médecin coordonnateur qui était opposé à la venue de personnel asymptomatique, il a dû avoir quelques craintes ! 

TU : Le quotidien des résidents a dû aussi être pas mal chamboulé ?

MC : Dans un premier temps, nous avons pu organiser le restaurant de manière à ce que les résidents puissent prendre leur repas ensemble, mais évidemment avec des mesures sanitaires strictes : pas plus de deux personnes par tables, séparées d’un mètre, ….mais à partir du moment où des cas sont apparus, nous avons dû supprimer ce temps de restauration collective. Les résidents déjeunent désormais dans leur chambre : nous leur livrons de repas qu’ils doivent réchauffer. Et aujourd’hui, même s’ils n’ont pas l’interdiction de sortir, il leur a été fortement conseillé de limiter leurs allées et venues, alors ils ne sortent que rarement. Aussi pour améliorer l’ordinaire, nous avons organisé un service de courses. Compte tenu du nombre de résidents malades, les familles ne sont toujours pas autorisées à leur rendre visite, et bien entendu cela impacte fortement leur moral. Seul le personnel soignant et les aides ménagères peuvent entrer dans l’établissement.

TU : Si les pensionnaires sont éprouvés par l’isolement dû à la crise de la Covid-19, le personnel de l’établissement n’est pas épargné non plus.

MC : La première vague était difficile, la deuxième est extrêmement fatigante : nous sommes épuisés moralement et physiquement, c’est vraiment une situation très très difficile à vivre au quotidien. Heureusement, les familles, dans leur grande majorité nous témoignent leur soutien, leur gratitude : cette reconnaissance nous touche profondément…mais sans effectif supplémentaire, je redoute déjà l’impact d’une troisième vague.

TU : Un conseil, un avis à partager ?

MC : Je n’ai qu’un message à communiquer : Respectez les gestes barrières ! Portez un masque, c’est essentiel et ce n’est quand même pas compliqué !

 

Propos recueillis par Sylvie Excoffier