COVID-19 2ème vague : témoignages de militant·e·s : Virginie, directrice d'école maternelle

Publié le 16/11/2020

Alors que nous connaissons une seconde vague et que nombreux.ses sont les français.es re confiné·e·s, Flash Trait d'Union donne à nouveau la parole à ces femmes et ces hommes qui permettent à la vie de continuer.

Trait d'Union : Qui es-tu ?

Virginie : Je suis Viriginie Jauneau, directrice dans une école maternelle à Lyon 3. Cette école accueille 173 élèves, et compte 7 classes.

 

TU : La reprise des cours, ce lundi 2 novembre, s’est effectuée dans une situation particulière, entre protocole sanitaire renforcé et l'hommage que la communauté éducative rendait à Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie assassiné le vendredi 16 octobre par un terroriste islamiste.

V: En effet, c’est dans un contexte singulier que s’est déroulée cette rentrée, en raison des nouvelles mesures sanitaires mais aussi sécuritaires. La plus grande difficulté a été encore, comme lors du premier confinement, de gérer les nouvelles consignes hiérarchiques parfois contradictoires émanant de l’Education Nationale, qui ont été transmises en fin de vacances scolaires, au moment où normalement nous étions en congés. S’y est aussi ajoutée la confusion des informations délivrées en amont sur la date et l’horaire effectif de la rentrée.

S’agissant de l’hommage à Samuel Paty, et au regard de l’âge de nos élèves, des enfants âgés de 3 à 5 ans, nous étions attentifs à recueillir et apaiser les éventuelles inquiétudes liées à ce contexte, à leur faire exprimer leurs émotions. Chaque enseignant s’est adapté en fonction de l’âge des enfants mais aussi en fonction de ce que les élèves savaient ou pas de ce drame. Par ailleurs, afin de ne pas perturber le temps de recueil organisé en école élémentaire et d’être respectueux de la demande du Ministère, nous avons décalé les récréations du matin et décidé de proposer un temps calme, généralement autour d’une histoire.

 

TU : La directrice ou le directeur est souvent en première ligne pour gérer la complexité de la situation liée à la crise sanitaire : peux-tu nous en tracer dresser en quelques mots, les grandes lignes ?  

V: Entre pédagogie, charge administrative, lien social, management d’équipe et parfois pression des parents, la fonction de direction nécessite de multiples compétences mais aussi des moyens, notamment matériel, et surtout du temps ! La charge administrative est déjà importante habituellement, mais la crise sanitaire a encore augmenté le nombre de procédures administratives, sans pour autant qu’on bénéficie d’aide supplémentaire, de temps ni de moyens matériels pour assumer ces tâches efficacement, dans un climat serein. Nous sommes épuisés par le manque de moyens dont nous disposons : s’y ajoute parfois, et c’est le cas dans mon école, d’un manque d’ATSEM ; du coup, nous devons nous ajuster en permanence pour maintenir une organisation respectueuse du protocole sanitaire et de la qualité pédagogique. Nous nous retrouvons à arbitrer des choix : préparer sa classe ou répondre aux injonctions de l’Education Nationale qui deviennent contradictoires face à la réalité du terrain ? C‘est difficile à vivre quand le « en même temps » n’est pas réalisable faute de temps. Sur le long terme, cela génère aussi un sentiment d’impuissance, du stress, d’autant plus que la réalité de notre profession est méconnue et nos conditions d’exercice souvent caricaturées. Dans mon école, heureusement, il y a un bon climat : les parents nous témoignent leur confiance et reconnaissance, c’est important !

 

TU : Un message, un souhait ?

V :  J’aimerais que l’on fasse un coup de projecteur sur notre métier, que les parents et plus largement le public soient conscients et convaincus d’accorder plus d’attention aux enseignants, plus de moyens à l’école pour qu’elle soit à la hauteur des enjeux de société qui s’y jouent.

 

Propos recueillis par Sylvie Excoffier