COVID-19: S'ADAPTER AU TRAVAIL, TEMOIGNAGES DE MILITANTS - DIRECTRICE D'ECOLE - SGEN AUVERGNE

Publié le 01/04/2020

Dans le contexte sanitaire actuel, beaucoup d’entreprises, d’administrations ont mis en place des plans de continuité d’activité. En ayant recours au télétravail, en adaptant les organisations du travail, ou en proposant du chômage partiel, la plupart des travailleurs font face à des situations exceptionnelles. Chaque semaine nous partageons des témoignages de militants CFDT qui vivent ces situations.

"la classe à domicile révèle les inégalités", Julie, directrice d'école élémentaire

Trait d’union : Le jeudi 12 mars, les enseignants ont été informés de la fermeture des écoles à compter du lundi 16 mars, et de la nécessité d’organiser la continuité pédagogique…Comment cela s’est-il concrètement organisé, entre l’annonce et la mise en œuvre (informations aux parents, organisation, contenu et accessibilité des ressources pédagogiques) ?

Julie : J’ai été informée de la mesure de confinement, et du coup de la fermeture des écoles lors de l’allocution du Président de la république, jeudi 12 mars au soir. Aucune instruction du ministère ne nous a été communiquée (la circulaire ministérielle a été envoyée aux recteurs le dimanche 15 mars NDR), non seulement pour organiser la continuité pédagogique, mais aussi l’accueil des enfants des soignants. Cela a généré quelques tensions, entre l’information à donner aux familles, le maintien d’une cohérence au sein de l’équipe pédagogique, et la « pêche » aux informations. Heureusement, j’ai pu compter sur la réactivité de la fédération Sgen, car le comportement de certaines organisations syndicales était loin d’apaiser les tensions au sein de mon équipe.

Trait d’union :  Aujourd’hui, après deux semaines d’expérimentation de ce mode d’enseignement à distance, quelles sont tes premières observations (positives et/ou négatives)

Julie : Inévitablement, « la classe à domicile » révèle les inégalités, qu’il s’agisse des conditions d’accès aux ressources numériques (matériel, outils, connexion), d’accompagnement familial, … mais cela recrée aussi du lien entre les parents et les enfants, entre les parents et les enseignants puisque nous devons aussi, en cette période, communiquer plus étroitement, c’est-à-dire avoir un lien au moins une fois par semaine, afin de prendre des nouvelles, s’assurer que les outils sont bien utilisés, répondre aux questions. Du côté pédagogique, j’ai privilégié les livres scolaires que les enfants et leurs parents connaissent, utilisent d’habitude et j’y ajoute d’autres ressources « ludiques » en complément. Je pense que viser un travail scolaire de 2 ou 3 heures quotidiennement c’est déjà pas mal.

Trait d’union : Et en qualité de directrice d’école, tu dois aussi organiser la relation avec l’équipe enseignante, mais aussi les « institutions » (Education Nationale, Mairie, etc…)

Julie : En cette période, il faut être réactif, et je m’efforce de communiquer toutes les informations utiles à mes collègues, mais c’est compliqué d’organiser une équipe pédagogique à distance, en fonction des disponibilités et ressources de chacun, cela complexifie les relations.

Trait d’union : Toi, en qualité d’enseignante mais aussi maman de deux enfants, comment vis-tu cette dualité mère/enseignante ?

Julie : C’est atroce ! J’avais déjà eu mon fils en classe, pour autant, je n’étais pas mieux préparée que les autres parents à faire la classe à la maison et à entendre des remarques du type « le maitre, il fait pas comme toi ! »

Trait d’union : Une bonne idée, suggestion, conseil, à partager, un message à diffuser ?

Julie : J’espère que chacun se rendra compte de l’intérêt de l’autre, des spécificités propres à chaque métier, qu’on arrête de se dénigrer les uns par rapport aux autres.

 

Propos recueillis par Sylvie E